Dans les années 1980, bien avant que le phénomène sneakers explose et pousse les fabricants de baskets historiques tels que Nike à s’entourer d’artistes émérites, les designers étaient en quelques sortes des stars qui avaient tous les moyens, ou presque, pour faire la différence. Dans l’Oregon, où la marque au Swoosh est historiquement implantée depuis 1972, celui qui allait devenir le plus illustre de ces designers s’est rapidement distingué autant grâce à son imagination que son audace. Tinker Hatfield n’était pourtant pas destiné à une telle carrière, en tout cas pas au sein de la division ‘’footwear’’ de l’équipementier, puisque c’est en tant qu’architecte qu’il a été recruté quelques années avant son premier coup d’éclat, la Air Max 1. Comment a-t-il alors réussi à bâtir ainsi le succès de Nike et de la Jordan Brand ? C’est la question à laquelle nous allons tenter de répondre ici, sur le blog de Kikikickz.
Du running au basketball, l’héritage multisports de Tinker Hatfield.
Avant toute chose, il faut souligner la grandeur de l’ambition qu’a immédiatement affichée Nike après sa création. Celle-ci l’a poussée à conquérir coûte que coûte plusieurs autres sports en plein essor à cette époque, à commencer par le basketball. La Air Force 1, la silhouette qui lui a véritablement permis de s’immiscer sur les parquets de la NBA, et donc de concrétiser l’un de ses principaux objectifs, est ainsi née en 1982. Cette conquête, aussi formidable fût-elle, n’a toutefois pas été sans conséquence pour la firme américaine. Nike y a en effet laissé des plumes, notamment sur le marché du running, offrant ainsi à ses concurrents la liberté de revenir dans la course.
Nike Air Max 1 : la naissance d’un mythe.
C’est précisément dans ce contexte que Tinker Hatfield s’est vu offrir un poste de designer au sein de la division ‘’footwear’’ de Beaverton. Sa mission fût aussi simple à comprendre que complexe à entreprendre. L’ancien perchiste de l’Université de l’Oregon, où il a rencontré le co-fondateur de Nike Bill Bowerman, a eu la lourde tâche de concevoir une paire de chaussures de course visuellement avant-gardiste et techniquement à même de surclasser les meilleures références du moment. Pour cela, Hatfield a puisé l’inspiration dans son univers de prédilection, l’architecture, et ce durant une visite de Paris. C’est là, au cœur de la capitale française, qu’il a découvert le Centre Pompidou, un édifice doté d’une structure contemporaine dont il a cherché à reproduire la transparence via l’insertion d’une « fenêtre » dans la semelle de sa Air Max 1. Cette ouverture avait et a toujours d’ailleurs vocation à rendre visible la technologie d’amorti Air, le cœur du modèle sorti en 1987 et de toutes ses évolutions qui continuent d’assurer la pérennité de la gamme Air Max.
Bien plus qu’une gamme, la Air Max est un projet dont celle que l’on surnomme couramment « La Parisienne » n’était que la première pierre. Fort de son succès, Tinker Hatfield a eu carte blanche pour poursuivre son œuvre et lui donner davantage de sens en accordant au système développé par Frank Rudy en 1978 un maximum de place et de visibilité, d’où le nom Air Max qui lui a été attribué. En 1990, son dessein s’est concrétisé par la sortie de la Air Max 3, que l’on connaît plus sous la désignation Air Max 90 depuis 2000.
Tinker Hatfield à la rescousse de Michael Jordan.
L’entrée précoce de la Air Max 1 au Panthéon des sneakers a conféré à Hatfield une telle légitimité que c’est vers lui que s’est de nouveau tournée la marque à la virgule lorsqu’elle était sur le point de perdre Michael Jordan, à l’issue de la saison 1986-87 de NBA. Après l’échec de son deuxième modèle signature réalisé conjointement par Bruce Kilgore, le père de la AF-1 et Peter Moore, qui s’était pourtant illustré avec la Air Jordan 1 et la Nike Dunk en 1985, le numéro 23 des Chicago Bulls songea effectivement à quitter l’équipementier américain. Celui-ci appela alors son designer prodige à la rescousse. La suite, tout le monde la connaît. En misant sur sa bulle d’air emblématique et un design efficace pourvu entre autres d’un imprimé éléphant devenu culte, la Air Jordan 3 a définitivement convaincu la légende des parquets de rester. Et force est de constater qu’elle demeure une source intarissable d’inspiration pour des stylistes de renom tels qu’Hiroshi Fujiwara, qui l’a revisitée en 2020 pour signer la Fragment Design x Air Jordan 3 ‘’Black & White’’, un must-have disponible sur Kikikickz.
Au cours des années qui suivirent, Tinker Hatfield et Michael Jordan ont logiquement entretenu leur collaboration lucrative, avec à la clé des sneakers qui n’ont d’égal que le talent du joueur. On pense par exemple à la Air Jordan 4, dont vous avez peut-être le coloris ‘’Sail’’ d’Off-White en ligne de mire, et qui reste considérée légitimement comme une version améliorée de la AJ3, ainsi qu’à la Air Jordan 5 et à ses dents de requin inspirées de celles de l’avion P-51 Mustang, sur le devant du pied.
Affirmer que Tinker Hatfield a marqué à tout jamais l’histoire de Nike, et plus globalement des sneakers, de son empreinte serait un doux euphémisme. D’autant qu’il compte de nombreuses autres baskets classiques à son actif. Comment ne pas citer la Air Trainer 1 de 1987, qu’a popularisée John McEnroe sur les courts de tennis, ou encore la Huarache de 1991 et son chausson interne en néoprène similaire à celui qui équipe les bottes de ski nautique ? C’est également à lui que nous devons la mythique Nike Air Mag qu’il a imaginée en 1989 pour le deuxième volet de la saga Retour vers le futur. Bref, vous l’aurez compris, Hatfield est un designer de géni sans qui Nike n’aurait sans doute pas su s’ériger comme le leader mondial du sportswear qu’il est aujourd’hui. En tout cas pas aussi facilement. Ce dernier en a quoi qu’il en soit conscience car il s’efforce de perpétuer son héritage à travers des déclinaisons inédites de ses best-sellers que vous pouvez retrouver ici, sur Kikikickz, dans une collection unique d’éditions limitées pour homme et femme.
Crédits photo : Complex

Fan de sneakers depuis l'adolescence. J'ai un faible pour les Jordan rétro et les premières Air Max. J'interviens sur l'Edito pour vous parler de tout ce qui a trait à la culture sneakers, tant en termes d'actualité que d'histoire.