Alors que le Grand Chelem français de Roland-Garros frappe ses dernières balles, gros plan sur la marque française symbolique du tennis, Lacoste ! Créée en 1933 par le joueur professionnel René Lacoste et l'industriel André Gillier, la griffe au crocodile est une référence du sportswear chic, qui peut se targuer d'avoir profondément marqué l'histoire de la mode.

René le crocodile, inventeur du polo et du branding
Dire que Lacoste a marqué l'histoire de son empreinte est un euphémisme. La marque a tout simplement créé le polo, aujourd'hui considéré comme un grand classique des vestiaires masculin comme féminin, de même que le branding ! Deux initiatives qui émanent directement du fondateur René Lacoste, et de son désir de s'accorder plus d'aisance sur les courts.

Faisant fi des conventions de son époque, le tennisman raccourcit les manches de la chemise de rigueur sur les terrains, créant ainsi la chemisette polo en 1927. Il y greffe au niveau du cœur le symbole de son surnom, le crocodile, faisant d'une pierre deux coups en établissant Lacoste comme la première marque à apposer un logo visible sur un vêtement.
Le sportswear chic à la française...
"Pour le tennis, le golf, la plage". La première campagne de Lacoste est sans équivoque : son polo signature est destiné au sport de son fondateur mais aussi aux sorties en plein air, faisant de l'accessoire de sport un vecteur de style, et de style de vie. Visionnaire, Lacoste remporte un franc succès et deviendra après-guerre, au moment de s'exporter à l'international, un fer de lance du style preppy. Un sportswear chic dont il se fait le représentant dans une idée d'élégance à la française.

La progression de la marque se poursuit jusqu'à la fin des années 1980, moment où ses créations sont récupérées de manière inattendue par la jeunesse des banlieues françaises. Attirée par son image élitiste et le potentiel statutaire des produits, cette jeunesse va écrire une nouvelle page de l’histoire de Lacoste.
... et un symbole de la street culture
Popularisés par les rappeurs, comme le groupe Ärsenik qui pose en complet croco sur la pochette de son grand classique Quelques gouttes suffisent..., les survêtements, sacoches et casquettes Lacoste deviennent des étendards de la street culture. Une publicité opportune à laquelle la marque ne goûte pourtant guère : sa clientèle traditionnelle étant toujours la privilégiée qui joue au tennis ou au golf, elle craint de la voir s'éloigner devant cette appropriation de ses vêtements, s'inscrivant dans l'imaginaire collectif comme les composants de la "tenue de racaille". Mais loin de perdre de sa superbe, Lacoste se démocratise.

Il aura fallu attendre des décennies pour finalement voir la griffe se rapprocher de la street culture. En collaborant avec des entités comme BEAMS, BAPE ainsi que la référence absolue Supreme, et finalement, en signant des rappeurs comme égéries. Une démarche qui a cependant perpétué sa relation contrastée avec le hip-hop, dans la mesure où les artistes en question, Moha La Squale et Roméo Elvis, ont été épinglés pour des affaires d'agressions sexuelles... En attendant une alliance épanouie avec le rap, Lacoste a en tout cas épousé son ADN urbain sur les catwalks, sous l'impulsion de ses derniers directeurs artistiques Christophe Lemaire, Felipe Oliveira Baptista et Louise Trotter. De quoi faire vivre son héritage pluriel, des courts aux bas des tours.

Journaliste sneakers, mode, lifestyle. Auteur du livre "Sneakers Obsession".