adidas x Fear of God, nouveau YEEZY ou pétard mouillé ?

Enfin ! La collab adidas x Fear of God a finalement pris forme ce 19 avril, avec le défilé de la marque de Jerry Lorenzo à l'Hollywood Bowl de Los Angeles. Agrémentant la ligne principale, des sneakers, accessoires ainsi que de l'apparel issus du partenariat ont pu faire surface. Alors est-ce que l'attente en valait la peine, et a-t-on assisté à la relève de YEEZY chez adidas, comme certains peuvent l'avancer ? Eh bien non. Mais ce n'est pas une surprise, au fond : les signaux d'une déception étaient déjà dans l'air.

Deux ans d'attente, plusieurs faux départs et un partenariat revu à la baisse

Officialisée en grande pompe en décembre 2020, la collaboration adidas x Fear of God s'annonçait de première importance sur le papier. En ravissant à Nike l'un des chantres du streetwear luxueux, signature sneakers appréciée pour ses créations flanquées du swoosh, la marque aux trois bandes réalisait un gros coup sur le marché et plaçait logiquement de belles cartes entre ses mains : le communiqué évoquait la création d'une ligne collaborative intitulée Fear of God Athletics, tournée vers des produits b-ball performance et lifestyle, de même que la prise en main par Lorenzo de la division adidas Basketball. Avec pour but de "changer le visage de l'industrie", pour reprendre les mots du principal intéressé. 

Mais les choses ont traîné en longueur, et il aura donc fallu attendre plus de deux ans pour voir la collab se matérialiser. On a pourtant cru plusieurs fois à son arrivée, comme quand Lorenzo teasait puis présentait dans une exhibition en janvier 2022 des pièces apparel co-brandées. Et puis, on a fini par douter, lorsqu'un vestiaire b-ball d'adidas rappelant la patte FoG était dévoilé en décembre dernier : le designer a alors pris la parole pour démentir sa participation dans la création, jetant un froid sur l'association en annonçant sa révision. Il assurait n'avoir finalement pas pris la tête de la section basket d'adidas, et que son alliance ne portait plus que sur le développement de la ligne Athletics... Un sacré recul.

N'est pas YEEZY qui veut

Ainsi que le pointent des insiders, le remaniement comme le retard à l'allumage sont peut-être dus aux remous connus ces derniers mois par l'équipementier allemand, qui a procédé à des changements majeurs au sein de sa direction tout en gérant l'épineux cas Kanye West, dont le départ lui a beaucoup coûté. Mais on aurait pu penser qu'au contraire, en vue de la fuite de sa poule aux œufs d'or, adidas chercherait à pousser au plus tôt et au plus loin son partenariat avec Lorenzo. De la même façon qu'il promettait d'asseoir son positionnement sur le créneau high fashion il y a deux ans dans le sillage des YEEZY et Y-3, le créateur pouvait éventuellement sauver les meubles avec la fin du label de Ye. Dans l'absolu, ce ne sera pas le cas. Car nous y voilà, les premiers produits adidas x Fear of God Athletics ne sont guère emballants. 

Certes, l'ensemble est clean, comme toujours avec Jerry Lorenzo. Mais tout cela nous laisse un arrière-goût de déjà vu, qu'il s'agisse de ses sneakers lifestyle épurées ou de sa gamme performance, plus créative mais dont la ressemblance marquée avec les Air FoG est largement soulignée. "Deux ans pour ça", tel est le sentiment qui prédomine face à la collection. Une plate lassitude qui tranche avec l'épidermique des réactions pour les YEEZY Season 1 et YEEZY 750, elles aussi révélées deux ans après l'annonce de la ligne et dont le succès nous rappelle que l'attente n'est aucunement rédhibitoire. Et nous fait dire que non, la collab adidas x Fear of God ne se substituera pas, tout du moins en l'état, au label de Kanye West. Les designs ne nous apparaissent ni assez forts ni assez rassembleurs pour tenir la comparaison, dans l'attente de connaître un pricing qui devrait aussi refroidir des ardeurs. Si on en reste à ce qu'on a vu sur les podiums angelinos, FoG sera un nouveau coup dans l'eau pour adidas dans sa délicate entreprise de tourner la page YEEZY. Et la marque aux trois bandes de devoir troquer l'ambition initiale de "changer la face de l'industrie" pour un "parvenir à vendre les produits"... Du déjà vu, là aussi.

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Alexandre Pauwels

Journaliste sneakers, mode, lifestyle. Auteur du livre "Sneakers Obsession".